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• Les récentes émeutes de la faim confirment-elles le besoin d’une politique agricole soutenue en Europe ?
Alors que la hausse du prix du baril de pétrole concentrait toute l’attention des économistes et des Gouvernements, l’augmentation vertigineuse des cours des matières premières agricoles prend de cours toutes les organisations internationales, suscitant des mesures d’urgence improvisées et des constats alarmants face aux besoins alimentaires nouveaux.
Alors que les émeutes de la faim ont touché en avril dernier 40 pays dans le monde, la crise alimentaire est avant tout un enjeu sanitaire majeur. En Haïti, 80% de la population vit avec 2 dollars par jour et ne peut donc pas se nourrir le plus souvent. Le niveau extrêmement élevé des prix des produits alimentaires provoque ensuite un déséquilibre économique et social profond, qui atteint la stabilité politique des Etats et la paix entre les peuples. Si les pays du Sud sont les premières victimes de la crise alimentaire, les pays développés sont menacés par la volatilité des cours à laquelle font face les agriculteurs. Véritable défi stratégique pour l’avenir de la mondialisation, pour la lutte contre la pauvreté et le développement durable, l’agriculture nécessite en conséquence une Politique agricole commune (PAC) ambitieuse et renouvelée.
Accusée d’être inutile et dépassée, la PAC démontre aujourd’hui toute l’importance de se préoccuper des équilibres alimentaires et l’alimentation des citoyens tout en œuvrant pour la solidarité avec les pays les moins avancés. Alors que l’agriculture ne semblait pas proposer de perspectives d’avenir pour l’Union européenne selon certains de nos partenaires, elle est bien au contraire une chance pour la recherche, entre l’indispensable développement de nouvelles sources d’énergie et l’alimentation d’individus toujours plus nombreux dans le monde. Alors que la politique européenne en matière agricole a continuellement fondé la construction européenne, la crise alimentaire confirme à nouveau la nécessité de soutenir l’agriculture et de ne pas s’en remettre au « tout-marché ».
• Quels sont les chantiers prioritaires de la future PAC ?
Si la Politique agricole commune (PAC) est aux fondements de la construction européenne, elle n’a cessé d’évoluer pour faire face à la demande et plus récemment aux enjeux environnementaux. La réforme de la PAC prévue pour la renégociation du budget communautaire de 2013 a entraîné la présentation du Bilan de santé à mi-parcours de la part de la Commission européenne, dont les mesures proposées seront discutées prochainement au Conseil. La France souhaite en effet anticiper la réforme de l’agriculture lors de la prochaine Présidence et susciter le débat sur les grands défis qui se posent à l’Europe.
L’indépendance alimentaire est le premier objectif que l’Europe va devoir atteindre, avec l’augmentation et l’amélioration de la qualité de notre production. La modernisation et l’adaptation de l’agriculture aux nouveaux besoins doit être soutenue par l’Union européenne. L’enjeu environnemental doit ensuite être davantage intégré aux objectifs de la PAC. Avec la réduction progressive du recours aux produits phytosanitaires, c’est une agriculture durable que l’Europe construit actuellement. Chargés de nourrir les hommes, les agriculteurs ont un rôle majeur dans la préservation de la planète et la protection des sols. Enfin, les équilibres alimentaires doivent être mieux garantis par l’agriculture européenne. Face au fléau de la crise alimentaire, l’Europe doit agir encore davantage pour aider les pays pauvres à participer aux échanges et non à les subir comme aujourd’hui.
Face aux évolutions du marché, l’Europe doit adopter une ligne de conduite claire. Les mécanismes d’intervention tels que les quotas ne peuvent être supprimés sous prétexte de leur inutilité actuelle. Le niveau du prix du lait peut par exemple considérablement changé en une année (+80% en 2007 pour les produits laitiers selon l’Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation, FAO), prenant au dépourvu les acteurs de la filière. Cette dernière est un atout considérable pour certaines régions en Europe. En abandonnant les principaux instruments de soutien aux agriculteurs, l’Union européenne ferait fi des principes de solidarité et de cohésion entre les territoires.
Le découplage et la modulation des aides préconisés par la Commission européenne doivent par ailleurs être accompagnés d’un soutien aux secteurs en difficulté et d’une réaffectation des aides au développement rural, dont l’importance pour l’environnement et la cohésion territoriale est capitale.
Enfin, l’adaptation de l’agriculture européenne aux risques naturels et sanitaires nécessite une réelle réflexion et des mesures nouvelles pour soutenir les agriculteurs.
• L’utilisation des biocarburants ne doit-elle pas être remise en cause?
Les causes de l’augmentation des prix des matières premières agricoles sont nombreuses et transformer les biocarburants en seul bouc-émissaire de la crise actuelle serait excessif. Cependant, le recours aux produits agricoles pour le développement des sources d’énergie renouvelable suscite deux interrogations majeures. La première tient à l’impact environnemental des agrocarburants, dont les émissions de gaz à effet de serre (GES) restent encore trop élevées. En second lieu, la crise actuelle nous oblige à réaffirmer la priorité alimentaire de l’agriculture. Problème environnemental, les agrocarburants sont aussi discutables sur le plan éthique.
L'Atelier Europe remercie chaleureusement Madame le Député européen d'avoir participé aux Lundis de l'Europe et vous invite à la retrouver sur son site.