L'amendement 138 de la réforme européenne du Paquet Télécom sonne-t-il le glas de la future HADOPI ? Si oui, sur quels fondements le gouvernement français pourrait-il passer outre?
Madame la Députée européenne Dominique Vlasto membre de la Commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie du Parlement européen, nous répond.
Le 24
septembre dernier, à l'occasion de l'examen du Paquet Télécom qui
définit le nouveau cadre règlementaire pour les communications
électroniques, les députés européens se sont prononcés en faveur de
l'amendement 138 qui dispose qu'il ne peut être apporté de restriction
aux « droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux » « sans
décision préalable de l'autorité judiciaire et ce en application de
l'article 11 de la charte des droits fondamentaux ».
Il me semble pourtant que cet amendement 138 ne sonnera pas le glas de la future loi HADOPI pour deux raisons au moins :
- La première, la plus évidente du point de vue juridique, c'est que les Etats membres n'ont pas attribué à la Communauté européenne la compétence d'édicter de nouveaux droits et libertés fondamentaux réservés aux utilisateurs finaux de l'internet. Le Parlement européen n'est donc tout simplement pas compétent et c'est d'abord pour cette raison de bon sens que j'ai résolument voté contre l'amendement 138.
- Ensuite, il ne faut pas oublier que le processus législatif est loin d'être terminé. Nous n'en sommes qu'à la première lecture du Parlement européen et je pense que le Conseil va, pour sa part, sonner le glas de l'amendement 138 et non celui de l'HADOPI. Il est en effet peu probable que les Ministres européens soutiennent une approche juridiquement douteuse et décident d'imposer que les Etats membres soient obligés de s'en remettre aux seules autorités judiciaires pour décider des mesures à prendre contre la diffusion des contenus illicites sur l'internet.
Les libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne priment pas sur le respect du droit de la propriété intellectuelle sans lequel la rémunération des artistes est remise en cause.
Il me paraît donc légitime, sur cette question, que chaque Etat membre puisse prendre ses responsabilités, expérimenter des solutions et qu'éventuellement, à partir d'une évaluation de ces solutions, on envisage si nécessaire une réponse européenne commune.
En tout état de cause, l'HADOPI est une de ces réponses, intéressante et utile en ce qu'elle permet d'arriver à un équilibre juste entre l'accès aux contenus sur internet et le respect des artistes et de leurs œuvres.
L'Atelier Europe remercie chaleureusement Madame le Député européen d'avoir participé aux Lundis de l'Europe.