Nous rencontrons, et nous remercions vivement pour leur accueil, Marie-Gaëlle Robles, Première secrétaire, et David Kibler, Premier secrétaire - diplomate de renfort pour la présidence danoise, à l’Ambassade de France à Copenhague.
Ils nous indiquent que le choix a été fait par les Danois de piloter la PDUE depuis Bruxelles où leur Représentation permanente est très active. Les Danois sont expérimentés et très professionnels: il s'agit en effet de leur 7ème présidence tournante à la différence de la Pologne et de Chypre dont c’était et ce sera la première. De plus, suite au changement de gouvernement intervenu le 15 septembre 2011, Copenhague a un Premier ministre formé au Collège de Bruges et ayant travaillé à Bruxelles. L’impression qui ressort est que le Danemark est vraiment compétent et s’est positionné d’emblée comme médiateur bien que hors de la zone Euro du fait de leur opt-out. On voit au quotidien qu’il joue le jeu des institutions européennes et qu’il compte bien arriver en juin 2012 à un compromis sur les perspectives financières multi annuelles.
D’une manière générale, la Danemark a développé une attitude constante vis-à-vis de l’UE, même si actuellement, il y a une inflexion, comme le montre la volonté de référendums sur les dérogations PESD et JLS, à l’égard desquels le gouvernement essaye de bien préparer le terrain pour qu’ils soient approuvés. Il n’est pas question pour le moment de référendum sur l’Euro dans le contexte de crise.
Les Danois espèrent aussi finaliser le marché commun digital et un accord sur les échanges frontaliers.
Le Danemark souhaite développer et réformer le SEAE sur deux aspects. Le premier est dans son rapport aux pays tiers avec un moment important que constitue la création du poste de Haut représentant aux droits de l’homme. Le second dans son développement en tant qu’institution pérenne et organe administratif avec le recrutement d'un personnel dédié.
A une question sur la coopération nordique, il nous est précisé que dans la pratique quotidienne, elle n’est pas exclusive pour le Danemark, du moins pas en concurrence avec l’intégration européenne, car ses membres sont assez hétérogènes et ils ne sont pas tous membres de l’UE.
Concernant l’OTAN et la question de savoir si le Danemark croit à la PESD, les Danois sont politiquement assez atlantistes et bien qu'étant un pays de taille moyenne, ils ont une projection expéditionnaire forte (Irak, Afghanistan, Kosovo, Libye…). Du fait de leur opt-out sur la PSDC, ils sont très actifs au sein de l’OTAN. Au moment de leur choix pour un opt-out, la PSDC était moribonde, et il s’agissait d’un choix politique à l'aune de la relation du pays d'avec les Etats-Unis. Le contexte a évolué aujourd’hui.
Sur les événements en Syrie, le SEAE est censé être le porte-voix de l’UE et le Danemark s’inscrit dans cette ligne, d’ailleurs l’ordre du jour du Conseil Affaires Générales est piloté par le SEAE. Tout dépend de la vision du SEAE qui va émerger dans le temps tant au niveau des ressources propres que de la répartition des compétences et cela se fait en continu au-delà de la PDUE.
Concernant l’attitude de la PDUE vis-à-vis de la Turquie, les deux pays ont de bons rapports bilatéraux. Au-delà de sa présidence, le Danemark jouera le jeu de l’UE notamment sous la présidence Chypriote de l’UE. Le Danemark a réalisé un rapport d’étape sur les négociations d’élargissement à cette lumière. Il n’y aura pas eu de décision d’ouverture de nouveaux chapitres, mais celle de promouvoir les échanges commerciaux au-delà de l’adhésion européenne en lien avec la stratégie de la Commission d’un « agenda positif » qui de fait ne peut pas être remplacé en toute hypothèse par autre chose avant la fin de la PCUE du fait de ses relations avec la Turquie.
Le Danemark a de bonnes relations bilatérales avec la France. Il n’y a pas de contentieux et la France est son 7ème partenaire économique. Pendant la PDUE, il y a eu beaucoup de visites bilatérales officielles. L’opinion publique danoise s’est passionnée pour les élections présidentielles françaises et la presse a sorti beaucoup d’articles sur les thèmes abordés pendant la campagne, notamment sur la désindustrialisation et les banlieues. Le dernier Conseil Affaires Générales aura lieu entre les deux tours des législatives mi-juin et forcément, cela oblige les autorités à être attentives à ce qui sortira des urnes.
À une question sur l’affaire des caricatures de Mahomet, il nous est précisé que l’actualité n’est pas aux questions de liberté d’expression et d’immigration en politique intérieure. Sur le premier point le débat a eu lieu et les tribunaux ont tranché quant à son encadrement juridique, sur le second on est dans une politique de continuité même si le gouvernement actuel va revenir sur l’obtention d’un permis de séjour à points et le durcissement du regroupement familial.
Il en est de même sur la « flexi-sécurité » qui ne va pas être remise en question, le gouvernement de centre-gauche a signifié son attachement à préserver ce modèle sans évolution majeure, de toute façon impossible du fait de la forte culture de consensus inhérente au Danemark, et renforcée par le poids des syndicats qui gèrent assurance-chômage et maladie avec un taux de syndicalisation très élevé.
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