[Tribune publiée dans la Libre Belgique le 6 mai 2010]
Nous allons célébrer, le 9 mai prochain, le soixantième anniversaire de la Déclaration Schuman. Il convient de saluer ce pas de géant dans l'histoire européenne. Après des siècles de divisions, de guerres intestines et d’une longue quête spirituelle et morale, l'Europe décidait enfin de s’inscrire dans une dynamique durable d'unité et de paix. Le projet de Robert Schuman dépassait, en effet, largement la simple perspective économique. La Communauté européenne du Charbon et de l'Acier, proposée à l'Allemagne et à la France, se voulait être un projet concret de civilisation fondé sur la méthode des petits pas, qui ambitionnait ni plus ni moins de jeter les bases d'une dynamique intégratrice permettant d'aboutir à terme à l'unité politique du continent dans une volonté de réunir les peuples de manière plus étroite tout en respectant la diversité de leur culture et de leur histoire nationale.
Soixante ans après la Déclaration, le projet européen a très largement prospéré. L'Europe a atteint un degré d'intégration inédit et, cette fois, non pas par la guerre et la conquête mais par l'acceptation pacifique d'une destinée commune. L'UE est une incroyable mosaïque composée de 27 membres, d’États ayant à leur actif une histoire, une culture, des traditions, pour certains, millénaires, et qui a su se doter d'un Parlement, d'une administration, d’une monnaie, d’un service d'actions extérieures…
Pourtant, l'Europe ne fait plus l'objet d'un large consensus en son sein. Il est désormais de bon ton d'accabler l'UE de tous les maux: la mondialisation, dont elle serait le cheval de Troie, la bureaucratie dominante, la perte d'identité... Les avancées incontestables offertes par l'Europe sont ignorées voir même réfutées comme si l’Europe était perçue comme un mythe, considérée comme un bouc émissaire. Même les européistes en conviennent, l'Europe est en jachère faute de perspectives claires et d'organisation optimale, bref de leadership.
Nous allons célébrer, le 9 mai prochain, le soixantième anniversaire de la Déclaration Schuman. Il convient de saluer ce pas de géant dans l'histoire européenne. Après des siècles de divisions, de guerres intestines et d’une longue quête spirituelle et morale, l'Europe décidait enfin de s’inscrire dans une dynamique durable d'unité et de paix. Le projet de Robert Schuman dépassait, en effet, largement la simple perspective économique. La Communauté européenne du Charbon et de l'Acier, proposée à l'Allemagne et à la France, se voulait être un projet concret de civilisation fondé sur la méthode des petits pas, qui ambitionnait ni plus ni moins de jeter les bases d'une dynamique intégratrice permettant d'aboutir à terme à l'unité politique du continent dans une volonté de réunir les peuples de manière plus étroite tout en respectant la diversité de leur culture et de leur histoire nationale.
Soixante ans après la Déclaration, le projet européen a très largement prospéré. L'Europe a atteint un degré d'intégration inédit et, cette fois, non pas par la guerre et la conquête mais par l'acceptation pacifique d'une destinée commune. L'UE est une incroyable mosaïque composée de 27 membres, d’États ayant à leur actif une histoire, une culture, des traditions, pour certains, millénaires, et qui a su se doter d'un Parlement, d'une administration, d’une monnaie, d’un service d'actions extérieures…
Pourtant, l'Europe ne fait plus l'objet d'un large consensus en son sein. Il est désormais de bon ton d'accabler l'UE de tous les maux: la mondialisation, dont elle serait le cheval de Troie, la bureaucratie dominante, la perte d'identité... Les avancées incontestables offertes par l'Europe sont ignorées voir même réfutées comme si l’Europe était perçue comme un mythe, considérée comme un bouc émissaire. Même les européistes en conviennent, l'Europe est en jachère faute de perspectives claires et d'organisation optimale, bref de leadership.
Comment expliquer un tel désamour? D’élection en élection, le taux des abstentionnistes, au sein de l’Union européenne ne cesse inexorablement de progresser, sans doute à cause de l’approche un peu trop élitiste de la démarche Schuman qui s’est focalisée sur les États et les gouvernements au détriment des citoyens. Elle est le fruit d'une génération politique (celle des années 1950), d’un contexte sociohistorique (l’immédiat après-guerre) où l'on conversait des affaires du monde entre soi, au cours de séminaires en Suisse, au Luxembourg ou dans tout autre lieu à l'abri des indiscrétions. Cette méthode a démontré son efficacité, notamment en permettant à la Communauté d'accroître fortement son champ d'action, mais il est évident que l'âge d'or de l'Europe est révolu. Les démocraties sont des institutions humaines en mouvement qui évoluent en fonction des contextes socio-économiques et humains. L’Europe ne saurait faire exception aux mutations qui sont en train de s’opérer au niveau des États qui la composent. Entre-temps, l'oublié de l'histoire, le citoyen, appelé sur le tard à s’exprimer, lors des différents scrutins référendaires et électoraux européens, n’a cessé d’exprimer ses doutes, ses réticences et son désintérêt.
Jean Monnet, dans ses Mémoires, estimait que la méthode communautaire ne garantissait pas un chemin linéaire vers une intégration toujours accrue. Cessons donc de la considérer comme un dogme! Nous ne renouerons pas avec l'esprit communautaire initial par une nouvelle réforme institutionnelle. Cessons de penser également à l'Europe en termes de transferts de compétences ou de conjectures sur la souveraineté à l'ère du "soft power". Aujourd'hui le déficit de l'Europe est double: c'est celui de la légitimité et de l'efficacité. Les citoyens européens sont désireux d'échanger entre eux, souhaitent s’émanciper de la tutelle étatique et participer à la décision politique, quel que soit l'échelon, local, national ou européen.
Certes, le citoyen a été peu à peu intégré au projet. Depuis 1979, le Parlement est élu au suffrage universel, le Traité de Maastricht l'a reconnu pour la première fois et le citoyen se voit garantir de plus en plus de droits, dont le dernier en date est l'initiative citoyenne prévue par le Traité de Lisbonne ouvrant à un véritable droit de pétition au niveau européen.
Toutefois, le citoyen européen ne saurait être un simple addendum au projet initial. Redonner sa pleine dimension aux démarches européennes ne saurait en effet s’effectuer dans l’esprit de la dynamique originelle à savoir reposer sur la seule dynamique des États. Il est temps que les peuples s’approprient l’Europe. Le citoyen doit être placé au centre du système communautaire.
L'Europe des citoyens ne se décrète pas! Elle a un prix que nul n'a accepté jusqu'alors; reconnaître enfin qu'il y a un modèle européen et que si l'Europe doit respecter les sensibilités qui la composent, à commencer par celles des États, le haut degré d'intégration désormais atteint n'a de sens et n'est soutenable à terme que si l'on confie le pouvoir au citoyen. Nul besoin d'un grand soir européen pour cela; le citoyen a déjà son forum, le Parlement, et la Commission devrait politiquement en être l'émanation légitime. Et ainsi assumer son rôle historique au service des citoyens européens.
Faisons de l’Europe un véritable enjeu politique tout d’abord en donnant toute sa dimension symbolique aux élections au Parlement européen en instaurant un jour unique de vote mais aussi en donnant plus de proximité aux enjeux européens notamment en proposant de mettre un terme au scrutin de liste et en faisant en sorte d’identifier un élu européen à un territoire. Donnons par ailleurs encore plus de force à la dynamique européenne et à sa dimension populaire en rendant obligatoire le vote pour ces élections. C'est ce deuxième âge européen, celui de la maturité démocratique, que nous appelons de nos vœux.
Loïc Tribot La Spière Jérôme Cloarec
Délégué général Président
CEPS Atelier Europe